Du cuir et des aiguilles pour du sur-mesure
Écrit par Régine Gapany
Le Messager (2024)
La sellière Stéphanie Dufresne a ouvert son atelier en 2017. La Veveysanne est également agente d’exploitation pour la commune de Siviriez. Portrait d’une jeune femme active au rire franc et au parcours atypique.
C’est à Porsel que la Chablaisienne Stéphanie Dufresne a trouvé son équilibre. La sellière de formation y a installé son propre atelier en 2017 dans un local qu’elle loue dans la ferme qui fait face au stand de tir à la route d’Oron. Depuis un an et demi, la désormais habitante de Porsel est également employée à la commune de Siviriez.
«J’y travaille à 70% comme agente d’exploitation et donne des coups de main à la voirie ainsi qu’à l’accueil extrascolaire, précise-t-elle. J’apprécie le contact humain que je trouve là-bas.» Ce qui lui permet de se consacrer à environ 30% à son activité de sellerie. «Je viens pratiquement tous les jours, entre mes horaires irréguliers, principalement les après-midi.»
En plus d’un bon outillage, le métier nécessite calme, concentration et force. Avec ses alènes, tournevis, marteaux de sellier, pointes de fer, abat-carres et couteaux en demi-lune, elle prépare les cuirs et textiles à passer sous ses aiguilles ou machines à coudre.
«Ce que j’aime dans ce métier, c’est le défi du sur-mesure, pour rendre un bon service, il faut se creuser la tête», confie la manuelle qui reçoit sur place ou se rend au domicile de ses clients. Ceux-ci viennent de la région, mais aussi du Chablais, du Valais, de Fribourg et de Genève.
Une matière vivante
«Le cuir, comme le bois, est une matière première, certes morte, mais bien vivante», note la sellière qui prend plaisir à la transformer. Elle utilise généralement du cuir végétal, avec des écorces utilisées pour le tannage. Ses fournisseurs suisses, se procurent la marchandise en Italie, en France et en Amérique.
«Il n’existe en Suisse aujourd’hui plus beaucoup de tanneries», déplore l’artisane, qui se réjouit d’en visiter une prochainement. Il lui arrive de faire des teintures, sur de petites surfaces, «juste sur les bords, pour que le rendu soit beau».
Stéphanie Dufresne répare des harnais, des guêtres et des brides, des couvertures et des courroies de cloches. «Il m’arrive aussi de refaire des fermetures éclair, des sacs et quelques pièces pour les combinaisons de moto.» Dans son atelier, en cet après-midi d’automne ensoleillé, une saison qu’elle affectionne pour ses couleurs, elle est justement en train de garnir un placet de siège en cuir.
Si elle ne conçoit par contre pas de selle de A à Z, ce qui prendrait trop de temps au vu de son emploi du temps, elle en répare souvent. Elle crée en outre des porte-clés, bourses, ceintures, boucles d’oreilles, colliers pour chien, étuis à couteaux pour lesquels il faut s’adapter à chaque lame et des attrapes rêves.
Univers équestre
La jeune femme de 33 ans a découvert le métier de sellière un peu par hasard. Si elle a toujours vécu au contact des chevaux, ses parents étaient agriculteurs à Roche, c’est par un apprentissage de peintre en bâtiment qu’elle a commencé sa vie professionnelle. «J’ai par la suite tenté une reconversion dans le domaine social, mais après une expérience dans une institution liée au handicap mental, je me suis rendu compte que ce n’était pas exactement fait pour moi. Le travail manuel me manquait.»
Un service de conseil en orientation lui fait alors découvrir la formation de sellière, qui s’acquiert par un CFC. Après un stage chez Vionnet à Vuadens, elle y débute son apprentissage en 2012. «Les cours théoriques se tenaient au Centre d’enseignement professionnel de Vevey et les pratiques, une semaine par année à Zofingue, précise-t-elle. J’ai choisi l’option sport équestre, mais j’ai aussi touché au garnissage auto avec le textile et à la maroquinerie.»
En 2015, elle travaille encore quelques mois chez son employeur, avant de s’occuper de chevaux en tant que palefrenière dans une ferme thérapeutique pour des jeunes en difficulté. "Je faisais jusqu’à 35 boxes par jour". Quand j’ai ouvert en 2017, j’arrivais à venir à l’atelier environ un jour par semaine. Aujourd’hui, avec mon emploi à la commune de Siviriez, j’ai trouvé un bon équilibre", se réjouit celle qui vivait dans la commune glânoise jusqu’en 2021.
«En habitant à Porsel, je me suis maintenant rapprochée de mon atelier.» La sellière fait toujours partie du comité de la de gym de Siviriez, elle pratique également le Pilate et la marche en montagne. Et si elle s’est séparée de ses chevaux par manque de temps, elle continue de fréquenter le milieu de temps en temps, sans toutefois forcément monter…
Légende photo : Stéphanie Dufresne prend garde à la température de son atelier, qui ne doit être ni trop chaud, ni trop sec pour ses cuirs, notamment les naturels dont elle apprécie particulièrement la couleur.